RLB23 Finish Occitane 1112AB1967

Autrice d’un admirable début de course mais ralentie par des avaries et de longues heures de bricolage qui lui ont coûté très cher physiquement, Clarisse Crémer (L’Occitane en Provence) a réussi à aller au bout d’elle-même et de son aventure en solitaire, la toute première depuis son Vendée Globe 2020. À la barre de sa nouvelle monture, elle a franchi la ligne d’arrivée lundi 11 décembre à 21h33, à l’issue d’une course de 11 jours, 4 heures 29 min et 36 sec, à une vitesse moyenne de 13,02 nœuds sur l’orthodromie. Éreintée et un peu frustrée de sa performance, mais heureuse d’avoir bouclé cette course qui la rapproche de son objectif Vendée Globe, la navigatrice a en réalité parcouru 4507,05 milles à une vitesse moyenne de 16,78 nœuds.

Sur les pontons de Fort-de-France, à quelques heures du départ du Retour à La Base, Clarisse Crémer (L’Occitane en Provence) reconnaissait « un peu d'appréhension ». Et il faudrait être bien fou pour ne pas en ressentir ! Voilà près de trois ans que la navigatrice n’avait pas fait de solitaire, alors recommencer par l’Atlantique Nord, en plein mois de décembre, « c’est quand même un gros morceau ». Mais l’enjeu l’était tout autant : poursuivre la prise en main de son plan Verdier de 2019, ex-APIVIA de Charlie Dalin, et surtout boucler la course pour assurer sa qualification pour le Graal de l’hiver prochain : le Vendée Globe ! « Même si je suis une compétitrice, j’envisage la course de façon assez safe », expliquait ainsi la skipper de 33 ans. 

Ce n’était pourtant pas franchement la tonalité des premiers jours de course ! À l’issue d’un contournement de la Martinique maîtrisé, Clarisse Crémer pointe son étrave dans le Top 5 sur le long bord au près, cap au Nord. Ça dépote ! Mais au troisième jour de course, le « pamplemousse de réconfort » n’est plus suffisant pour garder le sourire… Sa bosse de ris, qui permet de réduire la grand-voile, explose, contribuant à une petite frayeur et une bonne session de bricolage.  « Roule ma poule ? Minute papillon ! Le bateau n’a pas fini de me réserver des petites surprises, voilà que mon compartiment avant est rempli d’eau suite à un dysfonctionnement du ballast… », écrit-elle avec son ton bien à elle ! Après une trempette en piscine option saute-mouton, elle reprend sa marche rapide, toujours accrochée au top 10.

Mais toutes ces mésaventures pèsent sur la navigatrice qui peine à trouver un repos récupérateur. « Je ne dors pas car je me trouve trop lente. Va vraiment falloir que j’apprenne à lâcher prise ! », écrit l’exigeante, toujours en quête du dépassement de soi. 

Fatiguée, exténuée à cause de la répétition des efforts, un temps même victime d’hallucinations, la navigatrice décide de mettre le hola alors qu’elle progresse vers l’Est. 

Mais dans la terrible houle de l’Atlantique Nord, freiner n’est pas forcément le plus facile à entreprendre ! Alors Clarisse Crémer essaie tant bien que mal de gérer sa monture, entre les accélérations et les arrêts-buffet dans la vague suivante… C’est à l’image des montagnes émotionnelles que traverse cette compétitrice dans l’âme, qui a bien du mal à ne pas se recaler dans le Nord pour attaquer à nouveau. 

A quelques jours de l’arrivée, des soucis de J2 viennent à nouveau ralentir sa course, tout comme un OFNI bloqué dans sa quille pendant plusieurs heures. Mais la navigatrice tient bon, il faut finir coûte que coûte, même si la copie n’est pas aussi propre qu’elle aurait aimée… « Il y a eu un petit coup de mou pour la Clacla », reconnaît-elle dans une vidéo du bord, sans jamais se départir de son autodérision. A quelques heures de l’arrivée, elle s’amuse encore : « Je pense que vous pouvez voir à ma tronche que je suis complètement explosée. A force de vouloir la jouer « safe », j’ai pas toujours fait les bons choix au final ». Qu’importe le constat, le résultat, lui, est bien là. En finissant son Retour à La Base en 12e position, Clarisse Crémer fait un pas de plus vers le Vendée Globe 2024 et a de quoi envisager la saison prochaine avec une sérénité bienvenue… et méritée. Pour montrer à nouveau tout son talent et sa détermination, il y aura bien d’autres occasions !

ELLE A DIT :

« J’ai l’impression d’avoir fait 12 transatlantiques en une ! Il n’y avait pas un moment où ça n’était pas à fond. J’ai fait pas mal de grosses bêtises qui me faisaient reculer d’un paquet à un autre, c’était un peu énervant. Il y a des moments où je suis volontairement allée dans le paquet d’après pour faire « safe » parce qu’il fallait vraiment que je termine. Mais globalement, j’ai appris plein de choses ! Quand on n’a pas navigué en solitaire depuis trois ans, tout est forcément un peu difficile. Les premiers jours, j’étais fragile, j’avais mal partout, j’ai mis du temps à me mettre dans le bain physiquement. Le bateau est dur sur certains aspects : je crois que Charlie (Dalin) est un dur au mal et on n’a pas vraiment le même gabarit. Pour moi, l’enchaînement entre la Transat Jacques Vabre et le Retour à La Base était le meilleur possible : tu fais une course en double, tu es fatiguée mais tu restes dans le bain pour du solitaire. Par contre, je n’ai pas forcément pris beaucoup de plaisir pendant cette course. Il y avait le stress de ne pas finir la course, j’ai mis du temps avant de réussir à dormir et puis les conditions étaient hyper intenses. On s’est pris front sur front, on a fait des plantés impressionnants… Ce n’était pas une partie de plaisir mais il y a eu de chouettes moments ! »

Sa course en chiffre

Arrivée :  11/12/2023 21:33:24 FR
Temps de course : 11j 04h 33min 24s
Écart au premier : 2j 04h 29min 36s
Écart au précédent : 06h 52min 10s
Sur l'orthodromie : 3 497.42 nm / 13.02 nds
Sur le fond : 4 507.05 nm / 16.78 nds