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Conrad Colman a franchi la ligne d’arrivée de la première édition du Retour à La Base en quatorzième position ce mardi 12 décembre, à 02h30. Le skipper de « Mail Boxes Etc. » aura bouclé les 3 500 milles théoriques du parcours en l’espace de 11 jours 9 heures 30 minutes 42 secondes, à une vitesse moyenne de 12,79 nœuds. Pas épargné par les tracas techniques mais toujours à l’offensive pour exploiter au mieux son bateau de 2007, le Néo-Zélandais a en réalité parcouru 4 274.19 milles à une vitesse moyenne de 15,63 nœuds. Il est le deuxième bateau à dérives à achever cette transatlantique retour en solitaire !

À l’instar de la loi de Murphy qui dit que « tout ce qui est susceptible d'aller mal ira mal », il faudrait créer une loi Conrad Colman, qui dirait en substance « même quand tout va mal, on peut faire bien », sans oublier de s’amuser tout du long ! Sur ce Retour à La Base, le skipper de Mail Boxes Etc. aura à nouveau montré toute l’étendue de son talent et de son insatiable bonheur d’être en mer, finissant 14e de la course et deuxième des bateaux à dérives, reléguant loin derrière son tableau arrière un nombre conséquent de bolides bien plus récents que son plan VPLP – Verdier de 2007.

Dès le départ, le Néo-Zélandais avait assuré le spectacle ! Le long des côtes martiniquaises, il avait ingénieusement fait glisser sa monture pour revenir bord à bord avec Jérémie Beyou (Charal) et Thomas Ruyant (For The People), obligeant ce dernier à une belle opération au chausse-pieds pour éviter la casse… Le ton était donné : il allait décidément falloir se méfier de cet intrépide Kiwi ! 

Il faut dire qu’il s’est vite senti dans son élément le skipper de Mail Boxes Etc. Certes, ce n’est pas son Pacifique natal, mais l’Atlantique Nord en décembre, ça se défend en matière de gros temps ! « Je porte enfin un tee-shirt et ça fait plaisir. Avec mes gènes, je ne suis pas fait pour les chaleurs de l’équateur ! », écrivait-il après quelques jours en mer. Et retrouver le solitaire n’était pas non plus pour lui déplaire, bien au contraire ! « J’aime la solitude et me sentir maître de mes choix. Parfois, je me pince pour me rendre compte que ce que je vis n’est pas un rêve, je suis bien entouré de sponsors sur les voiles et de nombreuses personnes qui m’accompagnent sur ce projet ! »

« Au premier rang d’un concert de death metal ! »

Un rêve, qui a pourtant tourné rapidement au cauchemar. Dès la première nuit de course, les casses se multiplient. Girouette, voie d’eau, poulie, boîte à réas… un inventaire à la Prévert de galères qui freine un peu le Néo-Zélandais, mais ne l’abat pas ! La trousse à outils n’est jamais bien loin, mais les fronts s’enchaînent, et il n’hésite pas à aller les chercher plus au Nord que ses concurrents à dérives : « Le premier gros coup de vent, je n'étais vraiment pas serein, le second j'ai pris confiance et celui-là, j'ai lâché les chevaux ! Le bateau vibrait, sifflait, chantait dans tous les sens. C’est comme si j’étais au premier rang d’un concert de death metal ! C'est dur la vie à bord, mais je suis content ! »

Car il est impossible de douter que Conrad Colman est heureux d’être en mer, preuve en est ce sourire vissé en permanence sur son visage. Fêtant ses 40 ans seul au milieu de l’Atlantique, il se fait même poète au contact des éléments : « Hier, le soleil s’est couché sur ma jeunesse, que j’ai laissée derrière, dans mon sillage ! Un coucher de soleil franchement magnifique, avec de l’orage. En regardant ça je pensais à ces fameux 40 ans souvent utilisés comme point de référence. Les nuages d’en bas étaient illuminés de toutes les couleurs avant d’être ombragés par la rotation de la terre, puis c’est la couverture nuageuse plus haute qui est réapparue dans la lumière. C’était une belle métaphore du passage dans la quarantaine »…

Quel plus beau cadeau pouvait-il s’offrir que cette remontée finale au classement, après le passage des Açores ? Passant de la 21e à la 15e place, le voici le long des côtes espagnoles, à un mille seulement d’Alan Roura (Hublot), qu’il appelle alors à la VHF. « Alors, tu dois pas être content de me voir, mais moi je suis très très content de te croiser ! », lance-t-il à son ami et collègue à foils, bien embarrassé dans la grosse houle du golfe de Gascogne, qu’il parviendra à dépasser quelques heures plus tard sur la remontée vers Lorient…

À l’arrivée, Conrad Colman a encore montré que malgré son tout petit budget, il était capable de très grandes choses. Et que sa passion de l’océan ne connaissait, décidément, aucune limite. Tout comme son ambition sportive !

 

Ses premiers mots au ponton : 

« Je n’ai pas eu une journée sans avoir peur de me faire mal, de tomber ou d’avoir un bateau qui se brise en deux... La vitesse qu’on est capable d’atteindre et de maintenir est assez impressionnante. J’avais déjà fait des transatlantiques en solitaire dans ce sens-là mais j’avais oublié à quel point c’était affreux, même avec un vieux bateau à dérives. Je n’avais pas navigué en solitaire depuis la Route du Rhum l’an dernier et je n’étais pas suffisamment en confiance avec le bateau pour tirer autant sur la machine. Avec tout le boulot qu’on a fait avec les systèmes, j’ai gagné de la confiance et j’ai pu au fur et à mesure passer les trois dépressions qu’on a eu à traverser sur cette course. C’était vraiment cool !

Généralement quand je parle de ce type de projet, je dis qu’il faut que le bateau reste petit. S’il devient grand, ça veut dire que je lutte contre lui et que tout devient dur. Là, j’avais l’impression que le bateau était tout petit, que je naviguais sur un Laser. J’anticipais les manœuvres, j’étais en bien avec la météo… En somme, j’étais vraiment en phase avec mon bateau. Je sais que je peux tirer sur la machine, que je peux tirer sur moi-même et franchement, c’est très satisfaisant ! Ça a été une belle ‘remontada’ et ça donne espoir pour l’année qui vient ! »

Sa course en chiffres

Heure d’arrivée : 02 h 30 min 42 sec

Temps de course : 11 jours 09 heures 30 min 42 sec

Milles parcourus : 4 274,19 milles

Vitesse moyenne réelle : 15,63 nœuds

Vitesse moyenne sur l’orthodromie : 12,79 nœuds