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Arrivé de la Transat Jacques Vabre le lendemain du départ du Retour à La Base, Tanguy Le Turquais ne sera resté qu’une poignée d’heures en Martinique avant de repartir. La suite ? Une météo favorable, un marin plus que motivé et une incroyable remontée de la flotte pour terminer, ce mardi 12 décembre, à la vingtième place. Le skipper de Lazare boucle sa transat retour après 12 jours et 7 minutes en mer, en ayant parcouru 4089,51 milles à une vitesse moyenne de 14,19 nœuds. Retour sur une belle aventure à base de témérité, de combativité et, avant tout, de plaisir.

Dix heures ! Dix heures seulement ont séparé son arrivée et son départ d’une transatlantique à une autre, la première en double et la seconde en solitaire. Le temps pour Tanguy Le Turquais de « déposer » son co-skipper, embrasser sa fille, confier une petite "job list" à son équipe, prendre une douche, faire une lessive, des courses de produits frais, un point météo et ça y était, il est déjà l’heure d’embarquer à nouveau à bord de son valeureux IMOCA, Lazare

Tanguy Le Turquais, c’est le tube de l’automne, une bouille enjouée en toutes circonstances et une certaine idée du bonheur, toujours communicatif. Le marin aime rappeler que « le but de son projet est de raconter des histoires ». Tanguy avait déjà vécu la naissance de sa fille en pleine Route du Rhum, il y a un an. Cette année, le marin a vécu et partagé de nouveaux épisodes à travers l’Atlantique, comme un conte de Noël avant l’heure avec sa bonne dose de courage, de dépassement de soi, de bienveillance et une sacrée rasade de talent.

« Comptez sur moi pour tout donner » 

Ainsi donc, Tanguy Le Turquais prenait le départ du Retour à La Base le 1er décembre dernier, 28 heures après ses camarades qui pointaient alors leur étrave déjà bien au Nord de l’arc caribéen. La motivation ayant raison de la fatigue, le skipper demeure heureux de ne pas avoir eu le temps de se « démobiliser » et de replonger rapidement en mode compétition. Et, sait-on jamais, « s’il y a une opportunité de recoller le paquet, comptez sur moi pour tout donner », expliquait-il avant de s’élancer ! Ça tombe bien, la météo est en effet favorable pour revenir dans le match, nul besoin de contourner l’anticyclone autant que les autres et une belle opportunité de bifurquer plus tôt vers l’Est. Résultat : dès le mercredi 6 décembre, Tanguy revient sur les retardataires. 

Débute alors une fantastique ‘remontada’ à bord de ce bateau qui avait pourtant tant souffert lors de la Transat Jacques Vabre, après avoir bien failli couler à cause d’une voie d’eau au large de Ouessant. Les ennuis enfin derrière lui, Tanguy, fin régatier, grappille les places une à une. Parti valeureux 31e, il passe les Açores en 24e position avant de franchir la ligne d’arrivée, ce mardi, au 20e rang ! Impensable il y a quinze jours à peine, le marin vient pourtant de réaliser une véritable prouesse sportive et sera donc bel et bien venu à bout de ses deux transatlantiques.  

Au-delà de la performance, c’est le parallèle de ses péripéties avec celles, quotidiennes, des colocataires de Lazare qui donne encore davantage de sens à son engagement. Lui qui s’évertue à rencontrer les « colocs » de l’association, compagnons d’infortunes et habitués à faire face aux galères de la vie, avoue puiser dans leurs encouragements et leur soutien la force de toujours y croire. En Martinique, il confiait ainsi : « Les gens s’en foutent de savoir que Tanguy Le Turquais fait du bateau. Ce qui compte profondément, c’est de permettre à Lazare de rayonner ». Grâce à ce magnifique ambassadeur, à bord de son voilier paré de rose et du mot "Résilience", le grand public continue donc de découvrir un skipper doté d’un sacré sens marin mais surtout une personnalité au grand cœur, capable de soulever des montagnes en plein océan.

Ses premiers mots à l'arrivée :

« C’est incroyable ! On a prouvé qu’on pouvait gagner sans arriver le premier !

Quand je suis reparti de Martinique j’ai versé ma petite larme, je trouvais ça génial de repartir mais je me retrouvais seul sur mon bateau, épuisé, et quand j’ai vu que le premier concurrent était à 300 milles je me suis dit que c’était débile, que je n’y arriverais jamais ! Mais ça a été une succession de chance météo, de bateau qui va vite, de planètes bien alignées, et dès que j’en ai rattrapé un je me suis dit que je pouvait en rattraper d’autres, et ça ne s’est jamais arrêté, jusqu’à la ligne d’arrivée. Je ne sais pas jusqu’où j’aurais été comme ça ! Je ne me projetais pas, je voulais juste faire une belle course et apprendre des choses pour le Vendée Globe. Ça a payé, je suis hyper content.

Je suis surtout très fier de mon équipe parce que les gens que j’ai rattrapés ce sont des gens qui étaient en train de bricoler sur leurs bateaux. Et moi je n’ai pas bricolé une seule seconde, je n’ai pas sorti la caisse à outils. On l’avait sortie avant à Keroman, il y a un mois de ça, mais sur les deux transats je ne l’ai pas sortie une seule fois. Donc je voudrais vraiment un tonnerre d’applaudissement pour mon équipe ! 

Quand tu as Lazare dans tes voiles, tu ne peux pas te permettre de faire autrement que de continuer. Quand on a tapé quelque chose pendant la Transat Jacques Vabre, évidemment qu’on s’est dit que c’était fini, qu’on allait abandonner. Et puis on a eu cette petite lueur d’espoir de pouvoir réparer et tout s’est enchaîné. On prend jour après jour et on y arrive, et porter les couleurs d’une telle association force à se bouger pour s’en sortir. Il y a Baptiste, le doyen de Lazare qui est là, qui vient de verser sa petite larme et tout le projet réside dans cette larme.

Pour ne rien vous cacher, je m’étais dit que si j’arrivais à revenir sur Violette ce serait génial. Et quand j’ai vu que je rattrapais les autres, c’était hyper grisant, je me suis mis dans un mode où j’ai dormi 3 heures en 3 jours, j’étais à fond, je ne me sentais même pas fatigué, porté par la compétition. Et puis pas de pression puisque comme tu pars derrière, personne ne t’attend ! C’était génial et mon bateau est incroyable, j’ai vraiment hâte d’aller faire le tour du monde avec. J’y suis encore plus attaché maintenant, et encore plus à mon équipe car c’est grâce à eux tout ça. On s’est montré résilients, on a voulu illustrer ce que Lazare fait chaque jour, prouver qu’on trouve toujours des solutions pour se relever, pour transformer un truc tout pourri en quelque chose de formidable ! »

Sa course en chiffres

Heure d’arrivée : 17 h 07 min 

Temps de course : 12 jours 7 minutes

Milles parcourus : 4089,51 milles

Vitesse moyenne réelle : 14,19 nœuds

Vitesse moyenne sur l’orthodromie : 12,14 nœuds